La CIHEF en quelques mots

 

Dans le but de préserver les garanties accordées aux victimes des conflits armés, l'article 90 du Protocole additionnel I aux Conventions de Genève de 1949 prévoit la constitution d'une Commission internationale humanitaire d'établissement des faits.


Créée officiellement en 1991, la Commission est un organe international permanent dont la fonction essentielle consiste à enquêter sur tout fait prétendu être une infraction ou violation grave du droit international humanitaire. La Commission est donc un mécanisme indispensable pour aider les Etats à veiller à l'application et à l'observation du droit humanitaire en temps de conflit armé.


Elle est composée de quinze membres servant à titre personnel, élus par les Etats qui ont reconnu sa compétence. 76 Etats, issus de tous les continents, ont déjà reconnu sa compétence.


La Commission a son siège à Berne. La Suisse, en tant que dépositaire, en assure le Secrétariat.



Les Conventions de Genève pour la protection des victimes de la guerre

Les Conventions de Genève de 1949, telles que complétées par les Protocoles additionnels de 1977, énoncent des principes et des règles qui visent à protéger les victimes de conflits armés et que les Parties à un conflit armé ont l'obligation de respecter. Au moment de la rédaction des Conventions de Genève, les Etats ont réalisé qu'il ne suffisait pas d'adopter des normes réglementant la conduite des hostilités pour que ces règles soient respectées. Ils ont dès lors également adopté des dispositions permettant de les mettre en œuvre et d'en assurer le respect. Les Conventions et Protocole exigent entre autres moyens que les Parties à un conflit armé qu'elles fassent connaître le contenu de ces règles au sein de leurs forces armées, qu'elles aient recours au système des Puissances protectrice, qu'elles reconnaissent au Comité international de la Croix-Rouge son rôle tel qu'assigné dans les Conventions et Protocole, qu'elles édictent des normes réprimant la violation de ces règles et enfin qu'elles engagent des poursuites judiciaires contres les auteurs de certaines violations de ces règles.



Une nouveau moyen de mise en oeuvre : la Commission

Le premier Protocole de 1977 met à disposition des Etats un nouvel instrument de mise en œuvre de mise en œuvre du droit international humanitaire. Il prévoit, en son article 90, l'établissement d'une Commission internationale humanitaire d'établissement des faits de nature permanente. La Commission est compétente pour enquêter sur certaines allégations de violations des Conventions et du Protocole. En 1991, les 20 Etats parties aux Conventions de Genève et au Protocole I ayant accepté la compétence de la Commission ont élu ses 15 membres originels. Un Etat reconnaît la compétence de la Commission en déposant la déclaration appropriée auprès du Gouvernement suisse. La liste de ces Etats est disponible sur ce site. Elle a plus que doublé ces sept dernières années si bien que plus d''un tiers des Etats parties au Protocole I ont à l'heure actuelle déposé une telle déclaration. Ces Etats se trouvent sur tous les continents.


En 1992, suite à l'adoption de son Règlement intérieur, la Commission est devenue opérationnelle.



La compétence de la Commission

Dans l'accomplissement de ses fonctions, la Commission a pour but de protéger les victimes des conflits armés en facilitant un retour au respect des principes et des règles de droit international applicables dans les conflits armés. La Commission est notamment compétente pour:

 

1. Enquêter sur tout fait prétendu être une infraction grave au sens des Conventions et du Protocole ou une autre violation grave des Conventions ou du Protocole,
2. Faciliter, en prêtant ses bons offices, le retour à l'observation des dispositions des Conventions et du Protocole.

 

La Commission fonde sa compétence sur la base de deux modalités différentes:


1.

Les Etats parties à la procédure ont accepté sa compétence en déposant les déclarations appropriées. Dans un tel cas, aucune autre manifestation du consentement n'est nécessaire pour fonder la compétence de la Commission, ou

2.

Une des Parties au conflit demande l'ouverture d'une enquête et toutes autres Parties intéressées y consentent. Dans ce contexte, la Commission a fait part de sa volonté d'enquêter sur les violations alléguées du droit international humanitaire, y compris sur celles qui surviennent dans des conflits armés à caractère non international aussi longtemps que les Parties au conflit y consentent.


De plus, elle a exprimé sa conviction sur la nécessité de prendre toutes les initiatives appropriées, le cas échéant en coopération avec d'autres organismes internationaux, en particulier avec les Nations Unies, pour lui permettre d'exercer ses fonctions dans l'intérêt des victimes de conflits armés. Cette conviction se fonde sur les articles 89 et 1er, paragraphe 1, du premier Protocole additionnel et sur l'article 1er commun aux Conventions de Genève. Au regard des spécificités du droit international humanitaire, il paraîtrait approprié que par exemple, le Secrétaire général, le Conseil de sécurité ou l'Assemblée générale des Nations Unies, demandent instamment aux Parties au conflit de donner leur consentement, voire que le Conseil aille plus loin en exigeant qu'une enquête soit effectuée sur la base du chapitre VII et de l'article 103 de la Charte des Nations Unies.


Cliquez sur le lien pour en savoir plus sur la compétence de la Commission et ses bons offices.


Les Membres de la Commission

Les 15 Membres de la Commission  doivent présenter des qualités reconnues de haute moralité et d'une impartialité. Ils sont élus pour un mandat de cinq ans par les Etats parties qui ont reconnu la compétence de la Commission. Ils servent à titre personnel, une obligation qui est renforcée par le prononcé d’une déclaration solennelle selon laquelle ils exerceront leurs fonctions de manière impartiale, consciencieuse et conformément aux dispositions du Protocole et du Règlement intérieur. Ces impératifs concernent également l’obligation de confidentialité liée à la conduite de ses activités. Parmi les membres actuels figurent des médecins, des juges, des experts militaires de haut rang, des diplomates et des spécialistes du droit international.


La procédure

A moins que les Parties n'en disposent autrement et une fois une requête déposée, l'enquête est effectuée par une chambre composée de sept membres. Sous réserve d'un accord entre les Parties sur des modalités différentes concernant la composition de la cette chambre, les membres sont élus comme suit: après consultation des Parties au conflit et sur la base d'une représentation équitable des régions géographiques, le Président de la Commission nomme cinq membres de la Commission. Ces derniers ne doivent pas être ressortissants d'une des Partie au conflit. Les deux autres membres - membres ad hoc - sont nommés respectivement par chacune des Parties au conflit et ne doivent également pas être ressortissants d'une des Parties au conflit.

La Chambre doit inviter les Parties à l'assister et à produire des preuves. La Chambre peut rechercher les autres preuves qu'elle juge pertinentes et elle peut procéder à une enquête sur place. La Chambre doit communiquer tous les éléments de preuve aux Parties, qui ont le droit de présenter des observations et de les discuter.


Une fois la procédure d'établissement des faits achevée, la Chambre doit établir un rapport d'enquête avec les recommandations qu'elle juge appropriées. Si la Commission n'est pas en mesure de rassembler des preuves qui suffisent à étayer des conclusions objectives et impartiales, elle doit faire connaître les raisons de cette impossibilité.


La Commission ne communique pas publiquement ses conclusions, à moins que toutes les Parties au conflit y consentent.

 


L'administration et le financement

Le Gouvernement suisse fournit à la Commission les services administratifs nécessaires à l'accomplissement de ses fonctions. Les dépenses administratives de la Commission sont couvertes par des contributions des Etats qui ont fait la déclaration prévue par le Protocole et par des contributions volontaires. Les Etats parties ont adopté un Règlement financier qui, pour l'essentiel, adopte la clef de répartition établie par l'Assemblée générale des Nations Unies pour les dépenses de l'Organisation. La ou les Parties à un conflit qui demandent une enquête doivent avancer les fonds nécessaires pour les dépenses encourues par une Chambre et doivent être remboursées par la ou les Parties contre lesquelles les allégations ont été portées à concurrence de 50% des frais de la Chambre. Si des allégations contraires sont présentées à la Chambre, chaque Partie devra avancer 50% des fonds nécessaires.



Le principe et son application

La Commission doit rester fidèle aux caractéristiques de base explicites et implicites contenues dans l'article 90: elle doit exercer ses fonctions de manière indépendante et impartiale conformément aux exigences d'une procédure équitable posées par le droit international et, sur la base du consentement des Parties.  La Commission est une institution présentant une flexibilité considérable. Pour autant qu’un mandat s’inscrive dans le cadre de ses buts et que la compétence de la Commission soit fondée, les Parties peuvent sur la base d’un accord décider d’adapter le fonctionnement de la Commission en ce qui concerne:

  • les moyens d'engager une enquête; ainsi, un Etat qui a accepté la compétence de la Commission peut demander une enquête sur une allégation d'infraction grave ou d'une autre violation grave même lorsqu'il n'est pas Partie au conflit, ou la procédure de la Commission pourrait être facilitée par l'entremise des Nations Unies,

  • la composition d'une chambre particulière,
  • la procédure à suivre,
  • le financement de l'enquête,
  • la forme des conclusions de la Chambre et de la Commission,
  • la publicité à donner aux conclusions et recommandations de la Chambre et de la Commission.


Le potentiel de la Commission

La Commission est convaincue que plus le nombre d'Etats ayant reconnu la compétence de la Commission sera important, plus son rôle en tant que mécanisme apte à inciter au respect du droit international humanitaire par l'établissement des faits et l'exercice de bons offices sera effectif. Le fait que le nombre d'Etat ayant reconnu sa compétence ait récemment doublé représente un encouragement concret à la poursuite de la promotion de ses activités. La déclaration adoptée par la Conférence internationale pour la protection des victimes de la guerre qui s'est tenue à Genève du 30 août au 1er septembre 1993 illustre également le réel potentiel de la Commission. Les Etats qui y ont pris part ont demandé à tous les Etats de faire tout leur possible pour contribuer à éclaircir d'une manière impartiale les allégations de violations du droit international humanitaire et, en particulier, pour envisager une reconnaissance de la compétence de la Commission.

 


La Commission

  • reflète le caractère humanitaire et non politique du droit applicable à la protection des victimes des conflits armés,
  • est une institution permanente à la disposition de la communauté internationale qui permet donc d'éviter la complexité liée à des nominations ad hoc,

  • a, parmi ses Membres, des experts hautement qualifiés, reconnus sur le plan international, indépendants et couvrant les domaines pertinents de sa compétence,
  • offre les garanties d'une procédure équitable et minutieuse qui représente une caractéristique fondamentale de tout mécanisme d'établissement des faits,

  • est soucieuse de restaurer une attitude de respect des Conventions et du Protocole, au profit de tous, y compris des Parties au conflit, et spécialement des victimes.

 

La Commission internationale humanitaire d'établissement des faits est une jeune institution. Bien que le Protocole ait été adopté en 1977, elle n'a été établie qu'en 1991. La Commission est devenue opérationnelle en juillet 1992 avec l'adoption de son Règlement intérieur. Depuis lors, son travail s'axe sur des matières pratiques, telles que la disponibilité de l'équipement pour des enquêtes menées sur place, l'établissement de listes d'experts spéciaux, l'examen de l'expérience des délégués du CICR sur le terrain, l'établissement de voies et moyens permettant de présenter la Commission à la communauté internationale et d'attirer l'attention de cette dernière sur sa disponibilité et, en dernier lieu, l'élaboration d'un mécanisme pour le financement de ses activités régulières.


La Commission est convaincue qu’elle est plus apte que d'autres organismes d'établissement des faits  à servir les intérêts de la communauté internationale. Dès lors qu’elle est un organisme d’établissement des faits permanent, elle estime qu’il n’y pas de justification  à créer de nouvelles institutions coûteuses sur une base ad hoc. Il appartient à la communauté internationale dans son ensemble et à chacun des Etats de prendre conscience de l'importance et de l'utilité de la Commission et de tirer avantage de son existence.


Soutien et encouragement à la Commission

Un certain nombre de résolutions, déclarations et lignes directrices adoptées par des organisations internationales apportent un soutien et des encouragements à la Commission. Ces documents appellent, notamment, les États à accepter la compétence de la Commission et à faire appel à ses services. En voici quelques exemples:


Assemblée générale des Nations Unies :

Résolution 55/148 du 12 décembre 2000

Résolution 57/14 du 19 décembre 2002
Résolution 59/36 du 16 décembre 2004


Conseil de sécurité des Nations Unies :

Résolution 1265 du 17 septembre 1999
Débat sur la protection des civils en période de conflit armé, 9 décembre 2005


Résolutions des Conférences internationales de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge :

Plan d'action adopté par la XXVIIe Conférence internationale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, 1999
Déclaration adoptée par la XXVIIIe Conférence internationale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, 2003
Résolution 1 adoptée par la même Conférence


Autres organismes :

Conseil de l'Europe, Assemblée parlementaire : Recommandation 1427 du 23 septembre 1999
Union européenne: Lignes directrices concernant la promotion du droit international humanitaire du 12 décembre 2005

CIHEF Commission internationale humanitaire d'établissement des faits
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